
Badjens de Delphine Minoui
Ma première se prénomme Zahra (Badjens*, c’est ainsi que sa mère choisira de l’appeler, elle qui n’a pas pu donner son avis sur le prénom). Elle est l’héroïne de ce roman centré sur les droits des femmes et la place qu’elles peuvent occuper dans un pays qui, dans toutes ses composantes, nie leur existence.
Mon deuxième est l’Iran, ou plus précisément la République islamique d’Iran, un état d’Asie de l’Ouest, Quand on aborde le sujet des droits humains, son fonctionnement fait froid dans le dos.
Ma troisième, franco-iranienne, spécialiste du Proche et du Moyen Orient et reporter de guerre, est Delphine Minoui, autrice de ce roman empreint de tendresse et d’espérance, mais témoin d’une réalité extrêmement dure et violente. Dans un ouvrage précédent, « Les passeurs de livres de Daraya », elle rendait hommage à de jeunes Syriens qui avaient décidé de sauver des livres ensevelis sous les décombres de la guerre et les avaient rassemblés en une bibliothèque clandestine.
Mon quatrième est un nom commun féminin en 7 lettres. Mot dont on se sent privé quand des tout petits privilèges nous sont retirés et qui, dans un pays où la répression se conjugue au quotidien, a une signification bien plus fondamentale : liberté.
Mon tout est rassemblé dans Badjens, un roman qui retrace la vie d’une jeune Iranienne de 16 ans, sur le point de mettre le feu à son foulard, en public. Perchée sur une benne à ordures, sous les acclamations de la foule, elle voit des images défiler soudainement dans sa tête : sa naissance (oh non, pas une fille !), son enfance, son père castrateur, sa mère soutenante, son premier amour et son infinie soif de liberté. Ce dernier livre de Delphine Minoui s’inscrit dans le contexte du mouvement « Femme, vie liberté » qu’a connu l’Iran en 2022 et qui a été réprimé dans une grande violence par les autorités gouvernementales.
*Bad-jens : mot à mot : mauvais genre. En persan de tous les jours : effrontée, espiègle.
- France